Sur la route il n'y a aucune garantie sur le temps d'attente. Une évaluation du temps d'attente espéré est d'autant plus fiable que la personne a l'expérience des paramètres de réussite (le temps, le jour, l'heure, la zone géographique), et la connaissance de l'emplacement.
Dans cette attente la personne se trouve nue, devant des individus protégés, motorisés, enfermés, en série (spécialement sur les rocades) dans des espaces restreints. La personne peut connaître l'isolement face à un flot d'individus séparés. La personne spectatrice vit un dépassement continu de véhicules, rythmant le temps qui passe.
La perception de l'emplacement et du flux de voitures se transforme progressivement : après un temps d'imprégnation de l'univers visuel et de fixation des voitures, la concentration est diffuse, il y a un décrochage mental de l'activité visuelle sur le matériel en mouvement, on se distrait dans ses pensées, mais on revient par à-coups sur l'observation pleine des véhicules habités de visages humains. Le flux hypnotique devient l'écran de pensées entremêlées dans la fatigue.
Lors du passage d'une voiture se joue principalement une réaction furtive de la part de l'automobiliste.
A la vue de l'auto stoppeur, l'automobiliste esquive souvent sa présence, et sa demande : en fixant le panneau de direction afin de ne pas croiser le regard, en regardant l'intérieur de sa voiture (le siège passager vide par exemple), ou bien en regardant la route.
Il reconnaît parfois la présence de l'auto-stoppeur par un salut de la main ou un sourire.
Il répond aussi fréquemment à la demande par : un non de la main, par un signe stipulant qu'il va rapidement changer de direction (tel qu'un doigt penché vers le côté de la route), par un signe qu'il va s'arrêter dans les environs (tournoiement du doigt), ou qu'il regrette de ne pouvoir prendre en stop (haussement des épaules) ; mais il s'exprime aussi de façon critique, du style : « c'est abuser de demander à monter dans une voiture » et ou « c'est abuser de demander une distance si longue », ou exprime un certain dépassement du style: « c'est loin cette destination », ou enfin exprime une culpabilisation de ne pouvoir prendre par peur de la rencontre insécuritaire.
Il est exceptionnellement hostile face à la présence et demande : il enclenche son clignotant en faisant semblant de s'arrêter, il s'arrête puis redémarre lorsque l'auto stoppeur se rapproche, il lance des appels de phares (souligne le parasite), il fait un doigté en roulant, il demande de l'argent.

Lorsqu'un automobiliste s'arrête, la rencontre de l'autre se fait d'abord par des premières informations visibles : le type de véhicule qui construit l'a priori ou pas de la position sociale ; et sa plaque d'immatriculation qui peut situer géographiquement la personne ; le premier regard sur l'automobiliste qui construit une idée de son âge de visage et d'expression et sûrement le sexe.
Les premiers échanges de parole formalisent le bonjour et la direction pratiquée et souhaitée. Puis se joue l'accueil dans l'espace privé (la propriété ou location) d'une personne qui le dirige (dans tous les sens du terme) et dans lequel l'auto-stoppeur est hébergé à court terme. Normalement se noue une complicité pratique, celle de partager un voyage. Une tentative d'échange apparaît par une présentation et ou une écoute de l'autre, dans le souci d'une compréhension mutuelle. Soit la parole est médiatisé par un sujet, partagé et vécu par tous, ou spécifique à la personne. Il y a donc fermeture sur un sujet (monologue) ou ouverture sur un sujet (dialogue). Selon que le sujet est public ou privé, on dévoile une partie de son intimité. Il peut y avoir une gestion du silence, des pauses dans la conversation, le voyage mécanique reste dans un échange silencieux.
Dans un véhicule, les personnes sont disposées de côté. Les regards peuvent se croiser de biais. L'automobiliste est dans l'initiative mental et physique de la conduite, l'auto-stoppeur peut surveiller de la conduite, restant physiquement passif.