L'auto-stop ouvre la possibilité d'une extension de son espace social de circulation. C'est à dire que l'on rencontre des personnes qui vivent des positions sociales différentes. En visualisant la somme des personnes qui ont pris un auto-stoppeur, c'est un défilé de statuts qui se crée en une combinaison unique. On retrouve à une échelle réduite une diversité des situations socio-économique de ce monde et ses écarts incroyables. Cela va du conducteur au chômage qui touche l'allocation RMI, ou rien, à l'entrepreneur de petite ou moyenne entreprise, et au cadre haut placé de grande entreprise. Il est extrêmement rare de côtoyer un aristocrate. C'est une opportunité que de pouvoir aborder un même sujet avec des personnes différentes à la suite, afin de récolter des données sur leurs représentations sociales, et d'autre part d'en discuter. Cela sert d'indication sur la température sociale, en terme de jugement du système (organisation sociale dominante), dans son fonctionnement global et ou dans ses implications sur la vie quotidienne.
Si l'échange est souvent limité à une discussion, c'est sans enjeux qu'elle peut se faire, sans rapport de domination. L'auto-stoppeur n'est pas le subordonné de la personne qui lui ouvre sa propriété, il ne risque pas ses moyens d'existence, ni son statut, c'est donc en toute quiétude que l'on peut prendre position sur un sujet discuté, même si la position sociale de la personne amène à se confronter en opposition d'intérêt. Par exemple avec un patron il est possible d'évoquer les conditions salariales et d'émettre un avis dessus, de développer l'idée d'abolition du salariat de manière sereine, sans exprimer d'hostilité à son statut, puisqu'il s'agit d'une personne et non pas d'une fonction qui emmène plus loin sur la route. Une discussion de ce type peut affiner les prises de position et déclarer les convictions de chacun, puisque le patron n'a pas à faire à son salarié. Tout cela est possible à partir du moment où le rapport qui se crée prête à la discussion posée, afin de ne pas se retrouver sur le bord de la route, délaissé par un automobiliste agressé.